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La Gazette de la Pampa !
30 octobre 2007

Sel, lagunes et tournevis

Bien bien bien... C est reparti pour une nouvelle edition de la Gazette, qui se fend cette semaine d une carte du trajet en goodie, pour ceux qui sont perdus. Cliquez dessus.

south_america_political2

Probablement le plus long post ever, vous lirez ce que vous pourrez, ca me fait une trace ecrite aussi. Mais vu les presque 100 pages lues par jour regulierement, je me dis que vous devez etre quelques uns a lire et a attendre quand meme :-)

Je suis donc parti de Tupiza avec une fine equipe compose d un irlandais, d un couple de hollandais, d un francais plus age, de Marcelo notre guide, de sa soeur Pamela a l intendance, et d une Jeep en piteux etat. Apres avoir quitte la petite ville, on se retrouve assez vite dans les hauteurs de l Altiplano, ces immenses plateaux andins a 4500m d altitude, desquels on a toujours cette image du troupeau de lama et de son gardien en poncho assis sur un rocher, jouant de la flute de pan sous son bonnet colore. Cliche finalement tout a fait valable, parce que c est exactement ce qu on a vu pendant le premier jour : des lamas et encore des lamas, quelques condors, des nandus, ces especes d autruches et meme des kiwis (wtf ? diront certains, mais oui y a bien des kiwis a 4500m dans les andes). Quelques tres belles vues. Des traversees de villages tellement recules et isoles que l argent n y a meme pas cours : tout repose sur l echange, de la laine ou de la viande de lama contre l acces au puit ou un peu de verdure. Comme chez les Schtroumpfs. Dans certains villages, les gens s enfuient meme quand des etrangers arrivent, n y etant vraiment pas habitues. Dans d autres on s est retrouve a jouer au volley ou au foot avec les enfants, qui s amusent d un rien, mais surtout de nous voir completement essoufles et accroupis au milieu du terrain vague a cause de l altitude.

L Altiplano, meme si considere comme plateau, reste tres vallone et notre Jeep, en fin de vie, a rapidement montre un capot fumant de facon inquietante. Marcelo nous a rassure, nous disant qu il faudrait surement s arreter regulierement pour verser de l eau qu il avait prevu en supplement sur le moteur. En revanche, il n a pas eu la bonne idee de mettre l eau du moteur dans des bouteilles differentes de l eau potable. Ce qui devait arriver arriva et l irlandais et votre serviteur furent contraints de faire arreter la jeep encore deux a trois fois plus souvent. Ce qui nous a pas mal pourri, en plus des intestins, la deuxieme journee.

Assis lui et moi a l arriere de la jeep, ballotes par les chaos de la piste et se cognant regulierement au plafond, on a passe le deuxieme jour fievreux, entre fous rires et grosses suees. Je crois qu il etait un peu mieux que le premier jour, puisqu on a traverse un village fantome irreel, relique d un ancien poste avance exploitant une mine d or sur une montagne voisine, et abandonne avec l extinction du minerai il y a 25 ans; les aguas callientes, ces eaux naturellement chaudes dans lesquelles ont peut se baigner. Mais j ai prefere eviter un bapteme malheureux a mon nouveau maillot... Et puis la Laguna Verde, qui est naturellement toxique, ce qui n est pas etonnant vu la couleur de l eau. L endroit est balaye des vents qui de toutes facons empechent toute vie aux alentours. Mais c est assez unique. Enfin, en fin de journee, l arrivee au geysers, a 5000 metres d altitude, etait une sorte de clou du spectacle. Si les jets de vapeurs et de fumees comme on a l habitude d en voir sur les photos sont rares, il est tres etonnant de voir ces centaines de petits crateres dans lesquels bouillonne une eau maronnatre, prete a sortir a tout moment. Il emane du tout une fumee suffocante, rappellant au centuple l odeur des oeufs pourris. Environnement hostile. Et encore plus pour cette deuxieme nuit a 4500m, dans un vague village ballaye par des vents a faire blemir un Inuit. Le froid traversait a peu pres n importe quelle couche de vetement, tant et si bien qu on s est presque tous retrouves avec tous nos vetements sur nous...

Le periple allait decidement crescendo, puisque le lendemain matin, celui du 3e jour, on arrivait a la Laguna Colorada, qui fait surement partie des endroits les plus exceptionnels du voyage. Il faut d abord imaginer une lagune gigantesque coincee entre 4 ou 5 anciens volcans a 5500 metres d altitude, et l imaginer rouge. Rouge rouge. Et toute calme, ce qui fait d elle un parfait miroir aux etranges reflets pour les volcans qui l entoure, mais surtout pour les milliers de flaments roses qui y vivent. Vraiment incroyable. Je dois avoir 200 photos de l endroit. Repartis, les lagunes s enchainent pendant que, l irlandais et moi etant remis de nos emotions, on commence vraiment a bien se marrer dans cette jeep au confort minimal. De plus en plus de sel dans le paysage, et on continue a voir des trucs bizarres et etonnants un peu partout, comme le desert de Salvador Dali, tres justement nomme si on considere la forme surreelle des rochers qui poussent ca et la au milieu d un desert de sable, l arbre de pierre, un volcan actif et fumant au milieu d un desert de roches volcaniques. Puis tout a coup, le soir arrivant, plus rien a l horizon...

Voila le salar, nous annonce Marcelo. On arrive dans un village dans lequel tout est fait de sel, puis dans un petit hotel au confort d apparence sommaire et au mobilier sans chichis. Les murs sont en sel, les matelas poses sur des piedestales en sel, les nappes sur des tables en sel, les coussins sur des sieges en sel, les lustres en sel sur des poutres en bois de cactus. Ambiance particuliere, finalement assez cosy dans son minimalisme. Le reveil a 4h le lendemain matin par -15 degres s est avere moins confortable, mais necessaire pour partir de nuit au milieu du salar et y assister au lever du soleil. Il est immense, de la taille de deux departements francais. A 360 degres il n y a rien que du blanc absolument plat. Les photos ont du mal rendre l impression qu on peut avoir dans cet environnement gigantesque et minimal. On croirait etre dans une autre dimension, formee par un bete plan tout blanc a l infini. On arrive finalement a une sorte de petite ile, sur laquelle pousse des cactus millenaires, rendus blancs aux extremites par les cristaux de sel. Le paysage est irreel, on a l impression de voir des cactus au pole nord. Le panorama se prete a quelques sceances de photos assez delirantes.

Sortis de ce desert blanc, on arrive a Uyuni, ou l equipe se separe. L athmosphere est vraiment rude, les gens ont tous des problemes de gorges parfois pas beaux a voir, le sel du salar ne contenant pas d iode. J ai pris le premier bus pour La Paz avec les hollandais.

La encore une aventure. Sur les 200 premiers kilometres il n y a pas de route. Je veux dire meme pas une route en terre, peut etre tres vaguement une piste. Le bus trace au milieu de l Altiplano, roulant sur des arbustes, des rocs, et traverse des ruisseaux. C est un bus classique, monte sur des pneus de 4x4 et dont le moteur a surement ete trafique. A l interieur tout est pete. Vous serez fort aise de vous imaginer vous asseoir sur deux barres de fer a peine recouvertes d un rembourrage qui ne rembourre plus, le bus n ayant pas d amortisseurs et foncant de nuit a 80 a l heure au milieu de rien. On est meme reste coince en haut d une cote, le fond de caisse touchant le sol et les roues avant en l air. Le chauffeur a coupe le moteur et attendu que le bus redescende en raclant le sol. Et dans tout ca, il y a des gens qui n ont meme pas de sieges pour la nuit, qui attendent au milieu et qui tombent regulierement sur ceux assis. Il y avait meme un gamin de 2 ans qui dormait allonge dans le passage central. Je n ai jamais vu ni imagine un truc pareil. A la fin des 11h de voyages (et 30h sans sommeil) qui se sont heureusement ameliorees en approchant de La Paz, avec les hollandais (heureusement qu ils etaient la), on etait rossés et hysteriques... En Argentine, si cela choque souvent parce que le tiers de sa population est passee sous le seuil de pauvrete apres la crise du debut des annees 2000, il y a au moins des infrastructures datant de la periode de prosperite et le pays redemarre en ce moment. Mais ici, c est vraiment le tiers monde. Le pays n a rien, et toutes ses richesses sont exploitees par des multinationales etrangeres, comme au temps des mines d argent de Potosi par les espagnols.

L arrivee a La Paz vaut le detour. Au bout du trajet, on commence a rentrer, toujours depuis l Altiplano, dans une zone de semis-bidonvilles certes tres grande mais dont on percoit la fin. On se dit que c est pas possible pour une capitale, qu il doit y avoir au moins des commerces, un centre ville historique ou quelque chose... Et tout d un coup, sans qu il soit possible de le voir venir, se revele un cratere aux dimensions bibliques, un truc vraiment enorme, entoure par les sommets de la Cordillere Royale, la crete enneigee des Andes, et au creux duquel est niche une metropole gigantesque. Entre 3600 et 4000m, les riches habitent en bas et les pauvres en haut, rare exemple de ce type. Il y a un traffic et une activite monstre et des scenes toujours un peu plus surprenantes a droite a gauche : les flics qui se font cirer leur rangers dans la rue, des gens qui vous accostent pour vous vendre un tournevis (wtf?) ou d autres trucs completement incongrus, des bus dont le moteur chauffe, claque, et enfument le centre ville sans que personne ne semble le remarquer. La Paz est aussi un carrefour pour les montagnards en tout genre venus escalader les plus hauts sommets et volcans alentours. Je ne vais pas y rester tres longtemps, on ne peut pas dire qu on s y sente particulierement en securite. Je prepare donc deja mon depart pour le Titicaca, a 4 heures d ici, ou je ferais escale a Copacabana, bien loin de la plage bresilienne du meme nom...

Bises a tous, pour les premiers a lire ce post ou en tout cas a arriver jusque la, les photos seront en ligne d ici 2 a 3 jours. It deserves a look.

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Commentaires
R
Bon ... c'est décidé, je ne me plaindrai plus jamais du froid, du manque d'eau et des petites pannes d'électroménager ... et quand j'aurai un coup de blues j'irai faire un tour dans ton bus avec la gazette de la pampa sous le bras...ça me fera vite passer mes états d'âme. Tu vas te réaclimater ??? pas trop vite, j'espère !!! GROS BAISERS.
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